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Fleurs coupées en France - Soutenir la relance de la production locale.

Points clés de l'article

  • Une production locale française victime de la concurrence : 85% du marché en importation et 96% des exploitations locales ont disparu en 40 ans.

  • Un renouveau s’amorce : le solde d’installation est positif depuis fin 2020.

  • Les importations : une délocalisation massive vers l’Afrique de l’Est et l’Amérique du Sud.

  • La rose représente 43% des importations et le tarif d’une rose française peut atteindre le double d’une rose importée, vendue entre 20 et 30 centimes aux distributeurs.

  • Une fleur achetée doit-elle être une rose ? Changement climatique, normes sanitaires, bilan carbone, concurrence ? Autant de questions autour de la relocalisation de la production.

  • De nombreuses initiatives naissent depuis 2017 autour de la relance de la filière des fleurs coupées.

  • Labels, projets et collectifs se mobilisent autour d’une production durable, responsable et concurrentielle.

  • Hélène Taquet, fondatrice du Collectif de la Fleur Française, nous parle du développement de la filière floricole.

  • Elzeard propose un outil adapté à la filière, confirmé auprès de 4 producteurs clients.

  • Elzeard adapte en continu ses fonctionnalités en lien avec la filière de fleurs coupées.

  • Partenaire du projet de programme MULTIFLORA, Elzeard s’implique aux côtés des producteurs.

A première vue, le constat semble sans appel : victime des concurrences Batave et mondiales, la filière fleurs et feuillages coupés en France ne repose plus sur une production locale. Les importations représentent plus de 85% du marché et le pays a connu une perte drastique de sa capacité de production. En moins de 40 ans, ce sont en effet 96,5% de ses exploitations spécialisées qui ont disparu.

Malgré ces chiffres, un vent nouveau semble pourtant souffler sur la filière : le sujet des importations et de leurs impacts écologiques et social prend de l’ampleur, porté notamment par les alertes des médias. En parallèle, de nombreuses initiatives se mettent en place pour valoriser la filière de production française : labels, collectif, charte de production, etc.

Faute de statistiques suffisamment précises, il reste complexe de quantifier précisément les nouvelles installations. L’érosion semble se stabiliser depuis 2020, avec une surface constante autour de 1700 hectares en France métropolitaine malgré la crise du COVID qui a encore un peu plus érodé la santé économique de la filière, de la production à la distribution.

Au final, le solde d’installations serait actuellement positif et les opportunités de relance de la production bien réelles.

Chez Elzeard, nous avons fait des cultures spécialisées notre crédo, en proposant un outil numérique de planification et de suivi des cultures. Proposé en premier lieu aux maraîchers, il est dorénavant offert à tous les agriculteurs dont le système de production implique une grande diversité de cultures, avec tout ce que cela comporte comme difficultés de gestion et d’organisation.

Nous nous intéressons à cette nouvelle dynamique dans la filière française de fleurs coupées. Avec un certain enthousiasme, on ne vous le cache pas : ne dit-on pas que tout le monde aime les fleurs ?

Une rose rouge pour représenter le secteur floricole en France.

Les importations : un impact majeur sur la production française

D’où viennent nos fleurs ? Cette question apparaît comme majeure dans de nombreux articles de presse de ces dernières années. L’Observatoire des multinationales, média en ligne, posait déjà cette question il y a 10 ans, en 2014. L’article mettait ainsi en exergue l’origine exotique des fleurs importées en Europe : 43% en provenance d’Afrique de l’Est et 15% d’Amérique latine. Soit près de 60% du total des importations françaises, sur le même continent que le pays restant pourtant aujourd’hui encore le plus gros producteur mondial de fleurs coupées : la Hollande.

La production européenne a été délocalisée massivement vers l’Afrique orientale et l’Amérique du Sud, en raison notamment de leurs climats favorables, permettant une production de roses à moindre coût d’énergie et surtout, toute l’année. Cette délocalisation n’a pas empêché pas le maintien de leur transit par les Pays-Bas : si sa production a également été en bonne partie délocalisée, le pays contrôle toujours la grande majorité du marché européen et assure tout ou partie du transit de l’essentiel des fleurs.

L’étude de Cranfield University, datant de 2007, nous apprend que la proximité du pays producteur n’implique pas nécessairement une plus grande vertu écologique, notamment en ce qui concerne les émissions de gaz à effet de serre : une rose produite sous serre chauffée aux Pays-Bas serait six fois plus émettrice de carbone qu’une rose kényane importée, malgré son transport, sur plus de 6500 km. Pourtant, le transport d’une seule rose depuis l’Afrique de l’Est représenterait une émission d’1 kg de CO2, soit l’équivalent d’un trajet de cinq à dix kilomètres en voiture.

Au final, le bilan carbone d’une fleur de saison produite localement serait en moyenne 30 fois inférieur à celui d’une fleur d’importation.

Ces éléments, qui peuvent sembler contradictoires au premier abord, imposent en réalité une remise en question à la fois de l’origine géographique des fleurs que nous achetons, de leur saisonnalité et enfin de leurs modes de production. La question ne serait donc peut-être pas tant de savoir d’où vient une rose, mais si elle a sa place chez les distributeurs en plein hiver.

Quoi qu’il en soit, la question climatique vient se mettre en travers du chemin des fleurs d’importation, comme de celles produites par le géant européen. Elle s’ajoute aux nombreux autres reproches qui pèsent sur l’origine exotique de ces produits, parmi lesquels la conformité de leur qualité sanitaire avec les standards européens ou leurs impacts environnementaux et sociaux dans leurs pays d’origine.

Du point de vue politique et des accords internationaux, la question de la relocalisation de la production n’est pas posée: en effet, l’Europe et le Kenya ont signé en 2023 un accord qui supprime les droits de douane et les quotas sur les importations de produits kenyans. Cet accord risque d’impacter les derniers producteurs de roses français, dont les tarifs peuvent atteindre le double de ceux des roses d’importation, vendues aux distributeurs entre 20 et 30 centimes d’euros en moyenne.

Pour autant, est-ce qu’acheter une fleur signifie nécessairement acheter une rose ? Cette dernière est en position dominante en France, avec 600 millions de tiges vendues par an pour 43% des importations de fleurs. Malgré cela, sans même se demander si elle peut être concurrencée par d’autres fleurs, n’existe-t-il pas une opportunité de relocaliser tout ou partie du reste des importations, soit les 57% d’importations restants ?

Un redémarrage semble toujours possible. Il reposerait sur toute la chaîne de production et de distribution : sur l’engagement des producteurs, la force de persuasion des fleuristes et la sensibilité des consommateurs.

Si l’on en croit un article de France Info datant de 2022, une nouvelle ferme florale sortirait de terre tous les cinq jours en France : de quoi faire éclore des alternatives pour les consommateurs dans un futur très proche.

De nombreuses initiatives pour relancer et soutenir la production locale

De nombreuses initiatives ont été engagées depuis une dizaine d’années pour valoriser la production locale sur le marché français et soutenir la filière.

Ainsi, le label Fleur de France a été créé en 2015 sous l’impulsion de l’interprofession Valhor. Une étude préalable a permis de mettre en lumière une opportunité de marché, puisque trois quarts des acheteurs ont déclaré qu’ils donneraient préférence à un produit d’origine française s’ils avaient l’opportunité de choisir.

Depuis 2017, ce label engage les producteurs dans une des quatre démarches de qualité existantes, parmi lesquelles le label Plante Bleue, la charte Qualité Fleurs et bien entendu, le label Agriculture Biologique. Trois des quatre démarches utilisables comme prérequis au label Fleur de France sont orientées sur l’écoresponsabilité de la production.

Le projet Bleu Blanc Fleurs a par la suite donné un cadre plus large au label Fleur de France : depuis 2021, cette initiative a pour objectif de développer un modèle économique durable pour la fleur française, de l’amont vers l’aval. Parmi les actions mises en place, un recensement a été engagé, à la fois des floriculteurs en activité et des potentialités de production sur les territoires.

C’est aussi en 2017 qu’est né le Collectif de la Fleur française, qui regroupe des acteurs engagés pour le développement d’une filière locale responsable, de la production à la vente aux particuliers. Fort de ses 650 adhérents, le collectif a pour objectif de redynamiser la filière et de mettre en lien les distributeurs et les producteurs partageant la même conception durable et saisonnière de la production de fleurs.

Sur l’origine des produits et la traçabilité, l’Union Nationale des Fleuristes, syndicat de fleuristes indépendants représentant 15% des détaillants, a pris l’initiative, en partenariat avec la FGFP, fédération de grossistes, de proposer à ses adhérents d’informer les consommateurs sur l’origine des fleurs vendues. Depuis juin 2023 et sur la base du volontariat, les fleuristes adhérents procèdent à un étiquetage mentionnant l’origine des fleurs. cependant, elle met autant en valeur les terroirs français ou européens que les terroirs colombiens ou kenyans, à en croire les kits de communication mis à disposition des adhérents.

On note enfin l’apparition d’initiatives dans le numérique, en faveur notamment de la structuration de filière et de la promotion des acteurs engagés pour la production locale. Ainsi, l’entreprise Sessile propose par exemple une plateforme pour trouver près de chez soi un artisan fleuriste indépendant, membre de son collectif et privilégiant les fleurs locales. De son côté, Fleurs d’Ici Pro propose des services de mise en relation des fleuristes et des producteurs, pour faciliter l’approvisionnement en fleurs locales. La startup recensait déjà 1000 horticulteurs et 700 fleuristes en 2021.

De nombreuses initiatives récentes vont dans le sens d’un redéveloppement de cette filière locale. , Elles embarquent avec elles des objectifs de responsabilité environnementale, de qualité, de rentabilité et de traçabilité des produits. Elles convergent vers le tout dans un cadre de structuration de filière, pour que les intérêts des distributeurs puissent s’aligner avec les possibilités et les atouts des producteurs français.

Economiquement, les floriculteurs français ne peuvent pas concurrencer à produit égal une rose importée d’Amérique ou d’Afrique hors saison. Et même si cela était le cas, la filière ne peut pas, dans le même temps, se prévaloir d’une plus grande responsabilité environnementale et augmenter son impact carbone. L’enjeu repose certainement à la fois sur le développement conjoint d’une gamme alternative et concurrentielle par les producteurs et sur son adoptionappropriation par les distributeurs et les consommateurs.

Face à cet enjeu, on ne peut que saluer les initiatives de structuration de la filière, portées par le Collectif de la Fleur Française et par Bleu Blanc Fleurs. Rapprocher l’offre et la demande, par une meilleure coordination entre distributeurs et producteurs semble essentiel pour confirmer ou forger des objectifs communs et accompagner le rebond de la fleur made in France.

Reste la question de la rentabilité d’une production française et de ses avantages concurrentiels : une fleur produite en France peut-elle vraiment concurrencer une fleur d’importation produite à moindre coût, et tout en étant rémunératrice pour les producteurs ? Et pour les distributeurs, quels intérêts ont-ils à s’approvisionner plus localement ?

Malgré quelques éléments de réponse glanés d’article de presse en statistiques agricoles, il n’est pas aisé de répondre à cette question. Nous avons donc choisi de la poser à une experte et militante de la fleur locale, qui nous a aimablement répondu !

Retrouvez l'interview d'Hélène Taquet, fondatrice du Collectif de la Fleur Française

Elzeard aux côtés des producteurs de fleurs et du renouveau de la filière.

Cela faisait déjà un certain temps que les idées fleurissaient chez Elzeard : la proximité entre le métier de maraîcher et celui de floriculteur apparaissait assez évidente.

Mais faute de temps et de clients concernés, les projets restaient dans les tiroirs.

Il a suffi pour les relancer d’une rencontre en septembre 2023 avec Audrey, une productrice de fleurs en cours d’installation, qui cherchait une solution numérique pour gérer plus efficacement son projet.

Après plusieurs échanges, nous avons, pu d’une, part confirmer la conformité des fonctionnalités existantes avec les besoins des floriculteurs et d’autre part soulever certaines priorités à mettre en œuvre rapidement pour répondre aux besoins spécifiques à ces nouvelles cultures.

Découvrez notre application

Etape 1 : Mettre à jour les fonctionnalités pour les adapter aux spécificités de la culture florale

La production de fleurs impose souvent une gamme diversifiée, comme en maraîchage. Contrairement à la production de légumes, cette gamme peut intégrer une proportion importante de cultures vivaces, là où les légumes ne connaissent que quelques exceptions.

Le premier défi à relever a donc été d’adapter les fonctionnalités d’Élzéard à la conduite de cultures vivaces, des itinéraires techniques jusqu’au plan d’assolement, en passant par les fiches de culture.

Le premier décembre 2023, les premières fonctionnalités voyaient le jour et notre base de données intégrait 300 nouvelles références de plantes à fleurs.

Désormais, les nouvelles fonctionnalités que nous déployons sont adaptées aux fleurs coupées comme au maraîchage.

Etape 2 : S’impliquer dans le développement de la filière locale

C’est aussi grâce à Audrey que nous avons aussi fait la connaissance d’Hélène Taquet, fondatrice du Collectif de la Fleur Française. Cette dernière nous a présenté la démarche et les projets du collectif et nous en a appris beaucoup, au passage, sur l’état de délaissement de la filière et le manque d’outils auquel elle faisait face.

Intéressée par notre approche, Hélène nous a invités à participer à deux réunions en Décembre 2023 autour d’un dépôt de dossier, dans le cadre d’un programme CASDAR MULTIFLORA: (Démultiplication des systèmes de productions diversifiées de fleurs coupées durables).

Le projet MULTIFLORA est porté par la Chambre d’Agriculture des Alpes-Maritimes, en partenariat avec de nombreux organismes, parmi lesquels le Collectif. Il a pour objectif principal la relance d’une filière locale de fleurs coupées, sur un modèle d’agriculture durable.

De ces discussions est notamment ressorti un besoin : produire et diffuser des références techniques et économiques durables pour les nouveaux producteurs. Un moyen a été identifié dans le même temps : un outil numérique, permettant de stocker de l’information, de la partager et d’aider au suivi des systèmes de production.

A l’issue de ces deux réunions, une approche collaborative a donc été proposée, dans laquelle Elzeard devient officiellement partenaire du projet MULTIFLORA et s’engage à appuyer tous les producteurs impliqués dans le CASDAR :

  • En adaptant ses fonctionnalités à la production de fleurs coupées.
  • En appuyant les producteurs dans leurs besoins d’échanges et de capitalisation sur les données.
  • En proposant un tarif de groupe, permettant d’encourager les producteurs à utiliser l’outil et à saisir leurs données, lesquelles pourront ensuite être mises en commun pour bénéficier aux nouveaux installés.

Etape 3 : Aller à la rencontre des producteurs

Depuis ses débuts, Elzeard tire sa substance des idées et des retours d’expérience des productrices et des producteurs. Nouvelle filière, nouveaux producteurs, nouvelles idées : quoi de mieux que d’aller directement les rencontrer ?

En Janvier 2024, nous avons répondu présent à une invitation à l’assemblée générale du Collectif de la Fleur Française pour rencontrer les producteurs, leur présenter notre outil et exposer les principes du partenariat autour de MULTIFLORA. Des échanges enrichissants et motivants et de nombreux défis à relever pour Elzeard.

Quelques mois plus tard, nous comptons déjà quatre clients floriculteurs et continuons à développer les fonctionnalités de l’application en prenant en intégrant les spécificités de la production de fleurs coupées. Et nous sommes fiers de pouvoir apporter notre pierre à l’édifice, aux côtés des productrices et des producteurs !

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